La plateforme RojaDirecta.me, permettant d’accéder à la diffusion gratuite de compétitions sportives, s’est vue refuser le régime de responsabilité allégée des hébergeurs par le TGI de Paris, car elle exerçait un contrôle éditorial sur les contenus diffusés.
La Ligue de Football Professionnel (LPF) avait attaqué l’exploitant du site Rojadirecta.me pour avoir publié un site internet entièrement dédié à la diffusion d’événements sportifs sans son autorisation. Le site étant constitué de liens hypertextes fournis par les internautes, Rojadirecta prétendait être hébergeur des contenus litigieux.
Dans un jugement du 19 mars 2015 du TGI de Paris concernant le statut d’hébergeur de Rojadirecta, les juges parisiens considèrent que la plateforme « répertorie, stocke, organise et propose, avec une présentation pertinente, à la fois chronologique et par types de sport, alliée à un moteur de recherche, des liens supposés envoyés par des tiers et permettant de voir en direct des matches sportifs d’actualité. Elle exerce ainsi un contrôle et une maîtrise éditoriale sur les contenus, dans le but déterminé de permettre de voir en direct ces matches normalement réservés à des publics restreints d’abonnés sur les chaînes et sites auxquels les droits de diffusion ont été vendus. Elle ne peut donc être assimilée à des sites comme “YouTube” qui se sont vus reconnaître le statut d’hébergeur, dont l’objet est la mise en ligne et le partage de vidéos sans distinction de contenus et non d’accéder en direct à des événements ciblés qui relèvent de droits vendus en exclusivité à des tiers. »
Dès lors qu’un exploitant de site internet joue un rôle actif dans la maîtrise éditoriale des contenus publiés, le statut d’éditeur lui est applicable. Rojadirecta est condamnée à supprimer et à interdire, sous astreinte de 5.000€ par jour de retard, la mise en ligne de liens hypertextes permettant de visionner les compétitions dont la LFP est titulaire de droits. Elle est également condamnée à indemniser la LFP à hauteur de 100.000 euros au titre de son préjudice moral.
Ce jugement fait suite à la décision de la CJUE du 23 mars 2010 concernant le statut d’hébergeur de Google, dans laquelle les juges européens avaient considéré que le statut d’hébergeur ne pouvait bénéficier à un prestataire que lorsque celui-ci « n’a pas joué un rôle actif de nature à lui confier une connaissance ou un contrôle des données stockées ». Cette importance du rôle actif avait de nouveau été affirmée dans l’arrêt eBay de la CJUE du 12 juillet 2011.